What happens at Ducasse: Alain Ducasse au Plaza Athénée



Ce qu’il se passe chez Ducasse reste chez Ducasse, même si on tente de l’écrire. Il y a quelque chose de terrifiant à passer les portes du restaurant gastronomique du Plaza Athénée.

A l’heure prévue pour le déjeuner, 13 heures,  la peur n’a rien à voir avec les 3 étoiles, plutôt avec une chaussure que l’on craint mal cirée, ou l’impressionnant décorum de la salle ; Patrick Jouin nous a moins impressionnées au Mandarin Oriental, et pourtant on retrouve bien son identité, de l’habillage de la pièce aux chaises installées sous des lustres qui ressemblent à une pluie de cristal, en trois averses argentées (il s’agit plus précisément de cristaux tailles Swarovski). L’équipe est au complet, aussi nombreuse que les clients: bonjour Madame, bonjour, Puis-je vous débarrasser,  et les chaises se tirent sur notre passage. L’idée? Un trajet fluide où tout doit être anticipe. Rien de trivial ne doit venir perturber l’expérience culinaire. Premier délice (des yeux), l’assiette « Volute » créée par le designer Pierre Tachon (à qui on doit aussi les supports sur papier japonais).

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Une fois installées à table, bouquet de carottes en décoration et sac à main bien posé sur un tiroir amovible (qui ne porte sûrement pas ce nom là), on peine à trouver nos marques: le restaurant est d’un autre monde et hors la musique classique diffusée, aucun son de l’extérieur ne passe. Du silence, mais pas du vide; le temps que l’on nous explique la carte posee devant nous et le menu Collection (4 mets en demi, fromages et dessert), nous voilà un peu mieux. L’équipe est rodée comme un orchestre pro, mais a la courtoisie et le sens de la blague à condition de donner le ton, la marque des grands, très probablement. Mettez de la distance, ils garderont la leur. Blaguez, ils riront et finiront, après quelques passages, par donner la réplique. Côte menu, la Collection donc, mais qui se surpassera bien au-delà de ce qui est annonce: des amuse-bouches en veux-tu en voilà, le premier, le deuxième, un demi plat , et de deux, et de quatre et une succession de desserts pour nous qui ne voulons pas de fromage.L’equipe sait s’adapter et en cuisine, tout suit. Horreur des abats? On vous déconseillera le ris de veau, dans la lignée. C’est bien parti.

Trouver sa place: check.

Intimidées, on se tape des sueurs froides en regardant la carte des vins. Des prix à 3, 4 chiffres et quelques noms… Romanée? Un jour… mais on déniche finalement quelques bouteilles à 60-70€ parmi les 1000 références que propose Alain Ducasse au Plaza Athénée, et nous voilà parties pour un Saint-Emilion qui, s’il ne ressemble pas à l’accord mets et vins rêvé, nous fait garder la tête haute (voir aussi: ressortir légèrement pétées).

Le truc d’un repas au Plaza, c’est qu’il est fort probable qu’on ne soit ni dotées d’une black card, ni couvertes par des notes de frais. Nos voisins picoreront probablement des assiettes à 100€ en les regardant à peine. D’autres sont là et bien là, pour fêter ou découvrir. Nous, c’est pour notre premier trois étoiles, curieuses et vaguement apeurées. Sauf qu’on en veut, on en redemande: découvrir, goûter, essayer, tester, à décliner sous toutes les formes, nous partons donc sur un menu quasi à l’aveugle en essayant d’y voir plus clair sur la réputation du lieu.

Le produit. Le produit. Le produit

Pour les 10 ans du restaurant Alain Ducasse au Plaza Athénée, l’accent a été mis sur le “retour à l’essentiel”. Le chef Christophe Saintagne travaille donc sur le produit avant tout, “sans superflu” (faire du  bon avec du simple, être moins dans la démonstration)- ce sera perceptible à chaque plat, mais après tout, nous n’étions jamais venues avant donc ne pourrons pas juger de l’évolution des plats. Certains intemporels, les plats stars du restaurant, sont restes à la carte, comme les Langoustines rafraîchies au Caviar. En tout cas, à chaque saison ses nouveaux plats (trois), goût oblige.

Est-ce l’enchaînement de “nouvelles” tables qui nous a saturé d’émulsions? Les plats nous font du bien parce qu’ils ne cachent rien, ils révèlent tout, ils jouent la sauce (on n’en mangerait pas tous les jours, mais là c’est un bonheur). D’ailleurs, des l’amuse-bouche, les crevettes bouquet sautées au beurre demi-sel (“tout se mange, même les têtes”) servies dans leur poêle à table se dévorent avec de bonnes tranches de pain grillé. On était déjà tombées amoureuses de la sélection de pains et de beurres (dont le pain des Amis de Christophe Vasseur et ceux du chef boulanger du restaurant), les jolies découvertes continuent. Le second amuse-bouche est servi entoure d’un papier de boucher: une tranche de lard d’Auvergne et une autre d’espadon fume, disposées sur du pain. Du produit quasi brut qui contraste avec la finesse des couverts et des assiettes, comme ces couverts-baguettes en titane du designer Paolo Vale.

Ouvrons officiellement le repas avec la Langoustine rafraîchie, caviar gold, le fameux must-try du restaurant. C’est fin, frais et puissant à la fois, et on l’accompagne d’un consomme de langoustines parfume à la citronnelle, au gingembre et à la mélisse.

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Arrive la Bisque d’écrevisse, cèpe de châtaignier et son blanc en neige, qui glisse dans la bouche, crémeuse et onctueuse. De mon côte, je déguste mon Légumes et fruits, un assortiment contraste de saveurs végétales sur lequel est tranche de la pomme fraîche, à tomber. La cuisson d’une simple carotte a un goût d’exceptionnel.

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Quand un plat vous donne envie de pleurer

… c’est rare, très rare, et c’est ce qu’a provoque le Homard, pommes de mer chez silencio 2. Une première bouchée, un arrêt sur image et: “je crois que je pourrais verser une larme”. Le homard est cuit en cocotte et accompagne de pommes de terre ratte de Noirmoutier. Pour ma part, je fonds sur mon Saint-pierre, artichauts, riquette et son jus d’artichaut légèrement citronné (achevé comme il se doit  grand renfort de pain). On a la mer sensible, non?

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Déjà bien achevées emotionnellement, nous enchaînons sur l’Agneau épicé et blettes et la Poularde rôtie et cepes (qu’on aurait  aimée encore plus moelleuse), savoureuse – et les cèpes, god, à croquer ou en puree,on ne s’en lasse pas. La bonne surprise vient de l’agneau, une viande que l’on n’apprécie pas spécialement d’habitude, mais dont la cuisson nous a vraiment séduites; un goût relevé par la sauce et de l’échalote confite.

Les desserts de Nicolas Berger

Et non! Le Plaza Athénée n’est pas que synonyme de Christophe Michalak. Le restaurant a son propre pâtissier, le Chef Nicolas Berger. Revue de craquage:

Le Baba au rhum comme à Monte-Carlo sert officiellement à fêter les 25 ans du Louis XV à Monte-Carlo et officieusement à se baffrer de creme fouettee sur un baba qui vient juste d’être imbibe du rhum de notre choix.

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Les Framboises, comme leur nom l’indique presque, sont servies en tartelette (coulis par dessus) et granité. L’excellente surprise vient de l’huile d’olive dans la tarte et le granité. Ne froncez pas, c’est délicieux.

Puis arrive la Noisette en trois parties: souffle, sorbet et gâteau (trois textures, trois températures différentes) ainsi que les Figues en feuille et rangs serrés, qui se mangent en 1, 2, 3 soleil. Et quelques feuilles de gavottes pour accompagner…

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Plus-faim-du-tout

Comment ça, un chariot à sorbets, chocolats, caramels et guimauves? Pour la route alors. Depuis le premier plat ce n’est plus une question de faim. Pamplemousse et poire, l’équivalent d’une tablette de chocolat et quelques truffes roulent les poules jusqu’à la sortie vers 17h, merci-au-revoir-à-un-jour-peut-être; oh? un cadeau en fleur de sel en partant.

La douloureuse



380€ le menu complet, 70€ la bouteille, mais vous passez trois à quatre heures à table, les produits sont exceptionnels (des produits au design de chaque détail) et il y a plus de staff que de clients. Nous avons eu la chance d’avoir deux places dans le cadre de Tous au restaurant: une addition très raisonnable au final, donc, mais surtout la véritable expérience d’un repas chez Alain Ducasse au Plaza Athénée. Le vrai menu, un grand service et un bonheur total qui nous hante depuis quelques jours.

Verdict Sex & the City

3 étoiles dans un 5 étoiles, sans erreur de parcours. On revient quand?

Informations pratiques

Restaurant Alain Ducasse au Plaza Athénée site web

RESERVEZ VOTRE TABLE

25 avenue Montaigne 75008 Paris

Déjeuner le jeudi et le vendredi de 12h45 à 14h15
Dîner du lundi au vendredi de 19h45 à 22h15

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