La noblesse du métier: Stéphane Ginouvès, MOF Barman au Fouquet’s Paris

Une fois n’est pas coutume, nous avons envie de commencer par le mot de la fin « du travail personnel, du travail, du travail, du travail ». Stéphane Ginouvès, barman au Lucien (au 1er étage du Fouquet’s Paris), est un artiste du cocktail et surtout un travailleur acharne. D’ailleurs, il est le premier à avoir été nommé Meilleur Ouvrier de France Barman, c’est dire à quel point la barre est haute.

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Son parcours est celui d’un self-made man qui a forgé seul et à coups de longues heures de pratique le savoir-faire qui lui a valu de nombreux prix : Champion de France de Cocktail Création en 2003, Champion du Monde Technique. Apres un BEP et un CAP à l’école hôtelière de Nancy, Stéphane devient le responsable du bar au MESS des sous-officiers lors de son service militaire. Il travaille ensuite à Nancy avant de rejoindre le groupe Disney, puis passe par les Hôtels Warwick et Westminster avant de rejoindre le groupe Barrière et le Lucien en 2008. Il devient le premier Barman Meilleur Ouvrier de France à 36 ans seulement…

Et d’ailleurs, ça se passe comment ? « C’est une démarche en plusieurs étapes et qui s’étend sur un an et demi. Inscrit en 2009, j’ai passe les sélections en novembre 2010 avant d’atteindre la finale en mai 2011. ». Avec un sacré paquet d’épreuves : écrites (connaissance des produits, des cocktails classiques), de pratique (dégustation de trois grands crus de café, de produits de bar, épreuve olfactive, prise de commande et relationnel client….) et de création puisqu’il lui a fallu, lors de la finale, créer son propre cocktail (le Beautiful Day sera son ticket gagnant) et le servir à un jury sans pouvoir le goûter. Beaucoup de travail et de stress, même si la compétition fait partie du métier, notamment lorsque l’on fait partie de l’Association des Barmen de France.

Qu’est-ce qui a fait la différence pour qu’il devienne Meilleur Ouvrier de France ? « Il faut arriver à être régulier sur toutes les épreuves, qui sont multiples et variées ». Depuis, Stéphane Ginouvès aspire à mieux faire connaître son métier auprès du grand public, qui est souvent loin de le considérer comme un art et un métier à part entière. Son col tricolore suscite bien des questions et est le meilleur moyen de remettre les choses en place – et nous le confirmons en goûtant ses cocktails : il faut du travail, des connaissances et une bonne dose de créativité pour trouver le bon équilibre.

Au Lucien, la création de la carte des cocktails se fait en équipe : chacun y apporte sa touche personnelle. Stéphane a beaucoup travaille sur l’élaboration des Cocktails du Siècle, qui célèbrent les 100 ans du groupe Barrière. 1 cocktail par saison, disponible dans chacun des hôtels du groupe, à l’exception du Fouquet’s où toutes les saisons sont disponibles.

Stéphane nous explique sa manière de créer : « comme en cuisine, on peut parler de patte du chef. Je travaille souvent avec l’association de deux parfums. C’est souvent de gammes que naît l’idée qui conduira à créer un cocktail. » Une vraie signature, et d’autant plus intrigante… que Stéphane boit très peu : « Personnellement je bois très peu d’alcool, voire jamais.  C’est une combinaison intuitive qui surprend parfois mes amis, comme un Tetris dans ma tête, je sais que tel produit va aller avec tel produit. Bien sûr je les goûte, je les connais, même si je ne les consomme pas au quotidien. »

Et qu’est-ce qui fait un bon cocktail ? C’est « l’équilibre entre tous les produits », le bon dosage entre le degré d’alcool et la mise en avant d’un produit.  Quant au métier lui-même, il demande bien des qualités : «J’ai choisi le métier de barman parce qu’il mêlait plusieurs métiers de la restauration. On y retrouve le côte relationnel, qui est très particulier au niveau du bar (avec parfois plus de connivence que dans un restaurant). Venir au bar est un choix, une démarche de plaisir. Il y a aussi le côte artistique, car on doit travailler la décoration d’un cocktail et le côte créatif dans les recettes, trouver les accords entre produits, se démarquer ».  Le succès d’un cocktail au Fouquet’s dépend aussi… de son nom ! Et oui, les créations les plus vendues sont celles qui font référence à l’univers de la marque et du casino. Lorsqu’on lui demande s’il n’en a pas marre de servir des mojitos, le Barman MOF s’en amuse : «c’est vrai qu’on se demande quel est cet entrain pour le mojito alors qu’il y a tant de cocktails ». Pour autant, le goût des Français est loin de se retrouver dans les préférences de la clientèle internationale, qui favorise plutôt les cocktails « plus secs, plus amers, comme les dérivés de Martini ».

Sachant que le Fouquet’s abrite aussi le Diane, restaurant étoilé au Guide Michelin, on ne peut pas s’empêcher de demander s’il a déjà élaboré un dîner en accord mets et cocktails. « On peut l’imaginer, on ne l’a pas encore fait mais c’est une idée !»

Et sinon, quelles sont les adresses parisiennes d’un Meilleur Ouvrier de France ? « Je vais souvent au Verre Bouteille, avenue des Ternes, qui est un petit restaurant bistro qui sert jusqu’à 5 heures du matin, j’y vais souvent après le service. On parle souvent de cuisine du terroir, là on est dedans. Gratin dauphinois avec le pavé de bœuf : c’est tout simple mais quand c’est bien fait… pas besoin d’aller chercher plus loin ». Et dans le domaine des bars, il y a plusieurs établissements que j’aime bien : le Westminster (Duke’s) pour ce côte très intime, avec une relation proche des clients. A l’époque, on faisait des clubs cigares… »

A tester de toute urgence : le Bombay-Marrakech, un fabuleux cocktail épicé…

(c) photos de ce portrait: Fouquet’s Barrière Paris

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